A bas l’intervention française en Centrafrique !
envoyé le 22/12/13 par PCInt Mots-clés  afrique   antimilitarisme  

Le gouvernement français a décidé à la mi-décembre d’envoyer plusieurs centaines de soldats en Centrafrique : officiellement 1600 (qui s’ajoutent aux quelques centaines déjà présents) pour une durée limitée, là aussi officiellement, à 16 mois. Le grand quotidien bourgeois Le Monde parle à ce sujet de « pieux mensonge destiné à ménager une opinion publique peu concernée » (1) ; mais l’expérience a suffisamment démontré que les mensonges, « pieux » ou non, accompagnent toujours les interventions impérialistes. Nous en avons encore un exemple répugnant à propos de cette opération militaire.

Selon le gouvernement en effet, la France n’aurait aucun intérêt en Centrafrique, et elle n’enverrait des troupes que pour sauver des vies humaines. Plaidant en faveur de l’expédition militaire, Fabius a invoqué un danger imminent de « génocide » (les ministres socialistes sont bien placés pour parler de génocide : c’est sous un gouvernement de « cohabitation » Mitterrand – Chirac que l’impérialisme français s’est rendu coupable de complicité active dans le génocide rwandais), et c’est avec cette justification que le conseil de sécurité de l’ONU a voté une résolution présentée par le gouvernement français pour justifier une intervention militaire (2)
Mais selon les médias, cela fait près de 4 mois que les militaires français préparaient leur opération !

C’est qu’en réalité, l’impérialisme français a des intérêts bien réels en Centrafrique. Ce n’est pas nous qui le disons, mais le Parti de Gauche de Mélenchon : plus franc que Hollande ou Fabius, ce parti soi-disant d’opposition de gauche au gouvernement, déclare que l’intervention militaire est « légitime » car « le gouvernement n’interviendrait pas si nos intérêts nationaux n’étaient pas en jeu. En l’espèce il s’agit notamment de l’uranium » (3).

Grand à peu près comme la France mais ne comptant que moins de 5 millions d’habitants, la Centrafrique est un pays essentiellement agricole dont la population est parmi les plus pauvres de la planète. Pourtant elle recèle des richesses indéniables, même si elles ne sont pas toujours exploitées en raison soit de l’enclavement du pays, soit du manque de capitaux. Outre les diamants (le scandale des diamants offerts par « l’empereur » Bokassa à Giscard d’Estaing contribua à la chute de ce dernier) et les bois tropicaux exploités par des sociétés françaises, la Centrafrique possède des gisements de cuivre et d’uranium qui ne sont pas encore réellement exploités (la société française Areva a repoussé la mise en exploitation de sa mine de Bakouma en raison de la baisse des prix de l’uranium sur le marché mondial). Elle possède aussi des gisements de pétrole : la concession d’un permis de recherche à une société chinoise par le gouvernement précédent est parfois cité comme une des causes de la rupture de l’impérialisme français, inquiet de la poussée chinoise dans le pays, avec Bozizé.

Mais peut-être plus important encore est l’emplacement stratégique du pays au cœur de l’Afrique, qui avait déjà été la raison de sa colonisation par la France au dix-neuvième siècle : limitrophe du Congo, du Tchad, du Soudan et du Cameroun, une Centrafrique en proie à de graves troubles fait peser une menace sur des pays de l’Ouest africain déjà fragilisés où l’impérialisme tricolore a des intérêts économiques plus importants.
C’est pourquoi depuis son indépendance juridique en 1960, la Centrafrique n’a jamais cessé d’être sous la domination économique et politique de l’impérialisme français qui intervient constamment dans sa politique intérieure.

Sans vouloir faire l’ histoire de cette domination au cours du demi-siècle écoulé, il faut rappeler quand même que les impérialistes français, après avoir soutenu le régime de Bokassa, jusque et y compris dans sa phase mégalomaniaque, le renversèrent en 1979 après qu’il ait manifesté quelques velléités d’indépendance ; ils réinstallèrent à sa place Dacko (le premier président de Centrafrique, qui avait été renversé par Bokassa), venu dans un même avion militaire que les troupes françaises… A cette époque et sous Mitterrand pendant les années 80 et jusqu’au début des années 90 le véritable dirigeant de la Centrafrique fut le colonel Mansion, des services secrets français !
Au début des années 90, les impérialistes français appuyèrent la venue au pouvoir « démocratiquement » de Patassé, y compris en intervenant militairement pour le défendre (1996).
En 2003 ils soutinrent le coup d’Etat du général Bozizé (dont le plus haut fait d’armes était le massacre de dizaines d’étudiants en 1979) ; des troupes françaises (y compris l’aviation et les parachutistes) intervinrent à plusieurs reprises pour maintenir son pouvoir face à des rébellions récurrentes. Une force africaine « de paix » et des soldats français s’installèrent à Bangui, sans évidemment que l’impérialisme ne trouve rien à redire à un régime brutal et corrompu : la brutalité et la corruption sont nécessaires au pillage impérialiste !

Mais des heurts avec des intérêts impérialistes français étaient apparus ces derniers temps, au point que, peu après son élection, Hollande déclarait, face à la création de la force rebelle Séléka, que les soldats français ne défendraient pas le régime Bozizé. Cependant en décembre 2012, alors que la Séléka, aux portes de la capitale, était arrêtée par les soldats tchadiens de la force africaine, des centaines de soldats français débarquaient en urgence à Bangui, officiellement pour assurer la sécurité des français présents sur place ; il s’agissait en faire d’accroître la pression sur Bozizé et son régime. Un accord était conclu pour la formation d’un gouvernement intérimaire et Bozizé promettait d’abandonner le pouvoir.

Mais quelques semaines plus tard, Bozizé revenait sur ses promesses : il se croyait suffisamment renforcé par l’arrivée de soldats dépêchés par l’Afrique du Sud qui est alléchée par les ressources minières du pays et qui brûle de prendre la place des vieux impérialismes coloniaux. Mais le rapace impérialisme français n’avait pas dit son dernier mot ; les troupes de la Séléka reprenaient l’offensive sans être arrêtées par les alliés tchadiens de la France, infligeant une cuisante défaite aux soldats sud-africains tandis que Bozizé réussissait à s’enfuir. Dès leur entrée dans Bangui, les insurgés de la Séléka demandèrent aux soldats français de les aider à « sécuriser » la capitale ; cependant cela aurait été une reconnaissance trop évidente de la collusion avec la Séléka et les militaires français se contentèrent de laisser faire. Mais en quelques mois les forces hétéroclites composant la Séléka prirent leur autonomie et mirent le pays en coupe réglée, provoquant par leurs exactions l’exaspération d’une partie croissante de la population. C’est devant une situation qui devenait de plus en plus explosive que l’impérialisme français se décidait finalement à intervenir…

L’envoi de soldats n’est donc absolument pas motivé par le souci de sauver des vies humaines, comme le prétend le PCF qui approuve cette intervention au nom de « la protection des populations civiles » (4) : l’impérialisme français a montré aux plus aveugles que ses interventions répétées en Centrafrique au cours du demi-sicle écoulé étaient exclusivement motivées par de sordides intérêts économiques et géo-politiques ! Sa domination sur ce pays africain, comme sur les autres, n’a apporté aux populations que des souffrances, du sang et de la misère ; par contre elle a rempli les coffres des requins capitalistes et des sociétés qui pillent le continent.

Mais il n’y a pire aveugle que ceux qui ne veulent pas voir : les partis de gauche hors du gouvernement comme le PCF et le PG sont tout aussi pro-impérialistes que le PS ! Les massacres en Centrafrique ont d’ailleurs pris de l’ampleur depuis le début de l’intervention militaire française, et des scènes de lynchage ont eu lieu sans que les soldats français interviennent…

En dépit de la véritable union nationale qui s’est constituée autour de cette intervention, les politiciens bourgeois de droite ou de gauche ne peuvent que constater qu’elle est impopulaire parmi la population en général et les travailleurs en particulier : en butte aux attaques économiques des capitalistes ici, ces derniers ne sont guère prêts à soutenir les attaques militaires des capitalistes à l’étranger !

Les prolétaires des métropoles n’ont aucun intérêt à soutenir les agissements impérialistes de leurs exploiteurs ; ils ont par contre tout intérêt à s’y opposer car les capitalistes y trouvent le moyen de se renforcer et de renforcer leur exploitation : un peuple qui en exploite un autre ne peut être libre, disait déjà Marx . La solidarité avec les populations et les prolétaires opprimés par l’impérialisme, la lutte contre toutes les exactions de l’ impérialisme, l’opposition à toutes ses interventions militaires – qui se déguisent toujours sous des prétextes pacifistes –, n’est pas un devoir humanitaire ou démocratique ; c’est une nécessité de la lutte prolétarienne de classe !La lutte anti-capitaliste ici est le seul moyen d’apporter une aide réelle aux masses exploitées et opprimées de Centrafrique et d’ailleurs en affaiblissant, en attendant d’avoir la force de l’abattre, la pieuvre impérialiste qui les étrangle.


A bas à l’intervention impérialiste en Centrafrique !
A bas l’impérialisme français !

Parti Communiste International

www.pcint.org

(1)Le Monde, 19/12/13

(2)En raison de ses difficultés économiques, le gouvernement cherche l’aide de ses « partenaires » impérialistes européens, américain et onusien . Mais ceux-ci ne montrent aucun enthousiasme à lui accorder une aide, financière ou autre, pour aider l’impérialisme français à se maintenir dans ses chasses gardées…

(3)cf http://www.lepartidegauche.fr/actualites/edito/la-centrafrique-l-armorique-26204

(4)Déclaration du PCF au parlement, 10/12/2013 cf http://www.communistes-republicains-partidegauche.assemblee-nationale.fr/expressions/intervention-en-centrafrique


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