MORT DE REMI FRAISSE ET DES AUTRES : NI OUBLI, NI PARDON

Il n’y a pas de mauvais résistant !

Dimanche 26 octobre, un jeune manifestant écologiste meurt sous les grenades de la police. Rémi Fraisse luttait à la ZAD (zone à défendre) du Testet dans le Tarn contre la construction d’un barrage géant destiné à subvenir aux besoins d’irrigation de quelques exploitations agricoles intensives. Ce projet est celui d’une agriculture capitaliste qui, dans une continuelle course en avant, exploite les dernières ressources disponibles pour maintenir des profits tout en sacrifiant des territoires et des populations. Depuis des mois, une résistance s’organise, elle prend plusieurs formes (occupation, recours au tribunal, etc) mais doit faire face à des attaques policières violentes . La mort de Rémi n’est pas une bavure mais le résultat d’une guerre de « basse intensité » menée depuis des mois.

Cette mort a entraîné des mouvements de colère et de protestation un peu partout en France. Les médias et les politiques se sont empressés de crier au loup en désignant les manifestants comme les « violents » tout en reconnaissant dans la même phrase que le manifestant tué était un pacifiste... Rémi n’était pas là par hasard à 2h du mat, il manifestait, sans clivage, avec des camarades. Il y a de nombreuses manières de lutter, chacun selon ses moyens et ses colères. À travers l’utilisation du terme « pacifiste », l’État pose ses conditions les moins susceptibles de le mettre en péril. Or l’expérience de ces dernières années nous montre que ces moyens d’actions ne sont pas opposés. Ils se complètent, et nous avons vu que réunis, des Contis à Notre-Dame-des-Landes, ils sont une possibilité de victoire . Cette séparation entre bons et mauvais manifestants est là pour nous diviser : ne soyons pas dupes et restons unis.

Enfin, cette mort nous rappelle la violence d’État qui via sa police/armée protège ses intérêts économiques et répriment les résistances pour maintenir un ordre social bien défini. Cet assassinat et les mutilations qui ont eu lieu dans d’autres manifestations (œil crevé, nez arraché, etc) mettent le doigt sur la vraie violence. Une violence organisée par de nouvelles armes dites « non-létales » qui pourtant apportent la mort, une violence aussi judiciaire qui tente de broyer individuellement des luttes collectives par des arrestations arbitraires comme à Paris, des gardes à vue, des comparutions immédiates.

Contre la gauche et son monde … répressif

La mort de Rémi est de la responsabilité de la gauche au pouvoir. Depuis des mois, le conseil général du Tarn, maître d’œuvre du projet, accentuait la pression policière sur la ZAD du Testet et ses défenseurs. De l’avis des gens sur place, ils sont même étonnés qu’il n’y ait pas eu de morts avant, tellement les attaques des flics et des pro-barrages (avec la FNSEA en tête) étaient violentes... Le PS n’est pas à sa balle d’essai car en bon représentant de la social-démocratie, il a toujours réprimé les mouvements sociaux qui le dépassent comme à Notre-Dame-des-Landes ou lors des précédentes grandes luttes. De leur côté, les Verts et leurs alliés associatifs continuent de prêter allégeance à ce pouvoir en se désolidarisant de sa base militante souvent impliquée dans les ZAD.

Cette mort est aussi à replacer dans un cadre plus large, celui de la répression au quotidien. Dans les quartiers, avec les contrôles au faciès, les arrestations arbitraires, etc ; la police mène une guerre aux classes populaires, laissées pour compte du système capitaliste et qui tentent de survivre par tous les moyens. Comme le manifestant politique, le « jeune des quartiers » devient un ennemi intérieur. En 2005, deux jeunes, Zyed et Bouna meurent dans un transformateur à Clichy-sous-Bois alors que la police les poursuivait. En 2013, dans le Pas-de-Calais, Lahoucine Ait Omghar est tué de plusieurs coups de feu car on le soupçonnait d’un vol. La sanction est toujours disproportionnée et ainsi la police tue entre 10 et 15 habitants des quartiers populaires par an en moyenne .

Au travail, la pression et la répression sont plus diffuses mais, des managers à Pôle Emploi, la logique reste la même, celle du cadrage d’une force de travail effective ou potentielle qu’il faut discipliner pour qu’elle continue à faire tourner la machine. Et lorsque des luttes sociales contre cette soumission émergent, la police est logiquement appelée à la rescousse. La répression s’abat alors sur des travailleurs comme lors de la grève de la Poste 92 qui a duré 170 jours ou lors des dernières grandes grèves de 2010 pour des motifs de lutte collective : occupation/blocage de voies de communication.

Aux frontières, la répression est la plus crue. A Calais, les migrants sont chassés dans les rues et enfermés dans le centre de rétention de Coquelles. Ils sont réduits à se cacher dans des « jungles » insalubres et chaque mois, des personnes meurent écrasées ou noyées en tentant de fuir cette pression. Face à cette situation, le PS via son ministre de l’intérieur annonce des renforts policiers pour sécuriser les intérêts économiques du port tandis qu’un nouveau centre d’accueil (de jour !) est créée pour éloigner les quelques 2000 migrants du centre et ainsi les rendre invisibles.

Pour une lutte globale

En premier lieu, l’interdiction des armes « non-létales » (flashball, grenades offensives, gaz de combat, etc) qui tuent et mutilent. Cette revendication immédiate peut paraître naïve car avec ou sans ces armes, la police tuera toujours mais sur le terrain et pour le rapport de force dans les luttes cela peut avoir son importance. Cela dit, notre objectif n’est pas de réformer la police mais de continuer à la dénoncer et à la combattre.

Ne nous arrêtons pas à la critique du bâton si on peut leur arracher la main. Rassemblons-nous et discutons pour construire un rapport de force concret, seul à même de faire gagner des luttes. Localement, elles sont possibles contre les projets du PS et des Verts :leur bétonnisation de Saint-Sauveur ou de l’ilôt Pépinière à St Maurice Pellevoisin, leur canal Seine-Nord et leurs grands projets urbains ; mais aussi dans les quartiers et dans les boîtes à travailleurs ou à chômeurs.

A Lille, à Calais, au Testet comme ailleurs, la répression tue. Organisons-nous pour la combattre. Nous ne leur ferons pas cadeau de notre silence.

[(Manifestation ce samedi 8 novembre à 18h Grand Place ! )]

Voir la chronologie de la lutte sur http://tantquilyauradesbouilles.wordpress.com/
http://zad.nadir.org/
Pour plus d’informations, voir http://resistons.lautre.net/ + interview de Matthieu Rigouste
Voir aussi http://grevedespostiersdu92.tumblr.com/