La constitution européenne que l’on nous a "concoctée", des plus obscures, soumet le droit social au fourches caudines du libéralisme.
La Sécurité Sociale, actuellement monopole public en France, est SIEG (Service d’Intérêt Économique Général) dans le jargon européen. Or, tout SIEG peut être (doit) être assumé sans limiter la "concurrence" : cela ne garantit en rien donc que la Sécu restera ce qu’elle est "entreprise de droit privé" chargée d’une "mission de service public", assurant de fait un "monopole public",
L’article I-3-2 met la « concurrence » au rang de valeur constitutionnelle fondamentale : L’Union offre à ses citoyens un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures, et un marché intérieur où la concurrence est libre et non faussée.
L’article III-166 dispose : Les entreprises chargées de services d’intérêt économique général ou présentant le caractère d’un monopole fiscal sont soumises aux dispositions de la Constitution, notamment aux règles de la concurrence, dans la mesure où l’application de ces dispositions ne fait pas échec à l’accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie.
un article paru dans le Parisien du 15 novembre 2004 (pdf joint) laisse pour le moins dubitatif :
’"Sécu : Douste et le monopole Philippe Douste-Blazy serait parfaitement informé de la fin programmée du monopole de la Sécu.
Interrogé par le docteur Esquirol sur la reconnaissance, par le ministère de la Santé, de l’abrogation des monopoles en matière de protection sociale, afin de se conformer à l’Europe, un de ses conseillers a eu le 29 octobre, une réponse limpide : « Le ministère est parfaitement au courant, mais, pour le moment, le ministre nous a dit que ce serait un suicide politique d’annoncer une chose pareille. Si le ministre annonçait la fin du monopole de la Sécurité sociale, cela soulèverait, dans l’opinion, une trop grosse vague de protestations. "
Les directives 92/49/CEE et 92/96/CEE donnent déjà le cadre légal de la privatisation totale de la Sécu. Le projet de Constitution offre le prétexte contraignant !
Le PDG de Buffalo Grill Christian Picard proposait récemment à ses 5500 salariés une assurance privée européenne remplaçant la Sécu !
Les assureurs Français, pour leur part, assurent...ne pas être encore prêts, mais...
Après les PTT ( La Poste, France-Télécom), EDF/GDF, la SNCF, l’ANPE, l’école envahie par les patrons... le tour de la Sécu (après le référendum ...sur la Constitution) ?
La "réforme" Douste-Blazy ( on achève bien les chevaux !) fait la part belle aux assurances privées : le patronat ne s’y trompe pas !
Il est revenu à la CNAMTS, à l’UNCAM
dans les "conseils de surveillance" de la Sécu, où les syndicats de salariés sont devenus totalement minoritaires
Guillaume Sarkozy est vice-président de l’UNCAM et de la CNAM (présidée par son allié CFDT)
à la présidence de la commission des AT/MP
Le Pro-Consul directeur de l’UNCAM et de la CNAMTS, Frédéric Van Roekeghem, successivement ancien directeur chez AXA, puis directeur général de l’ACOSS (organisme gérant les cotisations Sécu), puis directeur de cabinet de Douste Bla Bla, a "concocté" la "réforme" , décidera seul des niveaux de remboursement, donc de la part de "marché" concédée au privé !
En échange de bons procédés, l’ancien directeur de l’ACOSS, Jean-Louis Buhl, vient d’être nommé directeur de cabinet de Douste Bla Bla !!! Extrêmement bien placé après avoir connu de « l’intérieur » la Sécurité Sociale pour mettre en œuvre son démantèlement accéléré, non ? L’un des « durs » qui voulait dénoncer la convention collective des personnels de la Sécurité Sociale...
Daniel Lenoir, ex directeur général de la CNAMTS, est nommé...directeur général de la Mutualité Française.
Alain Coulomb, qui a fait l’essentiel de sa carrière dans divers organismes de sécurité sociale comme la Caisse d’allocations familiales de la région parisienne et la Caisse d’assurance maladie du Val-d’Oise a été chargé par Douste-Blazy d’une mission de réflexion sur le contenu et le déploiement du DMP.
Le DMP sera confié aux entreprises privées pour un côut prévisionnel de 15 à 30 euros par an et par assuré social.
Les crédits sociaux des Caisses primaires (destinés donc au plus pauvres) sont siphonnés … pour payer une « assurance complémentaire » dont une grande part reviendra aux assurance privées. Les mutuelles ont été très récemment alignées sur les assurances privées, par la mise en application d’une directive européenne de…1992
On ne compte plus les pans entiers qui sont concédés au privé : Van Roekeghem veut faire de la Sécu un simple « assureur ».
Hermange, directeur Général de la CNAVTS, dont l’épouse est… députée UMP (auteur du rapport Hermange sur la délinquance), prépare le recentrage sur le « cœur de métier ».
Dans les caisses vieillesse du régime général, plusieurs centaines de postes d’informaticiens doivent disparaître d’ici 2008. En 2004, l’équivalent de plus de 100 postes ont été privatisés.
Dans les Caisses Vieillesse (convention 2005-2008) , les Conseillers Retraite vont être chargés de « vendre » du Rachat d’Assurance, en concurrence directe avec les « fonds de pension
Créé par la loi Douste-Blazy, le DMP (dossier médical personnel/partagé) sera géré par des concessionnaires privés -tous liés aux grands groupes financiers-, au lieu de l’être par la Sécu. Un vrai pactole, puisque le coût de ce DMP est évalué entre 15 et 30 euros par assuré social et par an. Comme par hasard, le groupe informatique de not’ bon maître Ernest Antoine est sur les rangs…très bien placé.
La Cnil a donné le 9/11/2004 un premier feu vert à la transmission de données de santé réclamée depuis des années par les organismes complémentaires. Deux autres projets ont été déposés par AXA-Groupama et le groupe Swiss Life.
Cegetel (Vivendi Universal) a cédé Réseau Santé Social à la SSII spécialisée dans la santé CompuGroup. RSS est gestionnaire des flux SESAM-Vitale depuis 1998 dans le cadre d’une concession de service public.
La CNAMTS a choisi le groupe Atos Origin pour l’accompagner dans la phase pionnière du projet Diadème, le projet national de gestion électronique des flux documentaires des Caisses primaires.
Etc, etc...
les serveurs vocaux des Caisses sont concédés au privé
le matériel inforlmatique et logiciels des plateformes téléphoniques sont financés... par le coût d’appel, géré et concédé par le privé (préfixe 08)
certaines plateformes nationales (déclaration fiscales) ont été totalement confiées au privé... ex usine LU de Calais
Pendant ce temps, on réduit l’informatique de la Sécurité Sociale à peau de chagrin, des pans entiers sont soumis à la "concurrence". Les caisses nationales, dirigées par de hauts fonctionnaires d’Etat, contribuent ainsi au démantèlement de l’institution.
Des milliers d’emplois (plus de 10000 dans les CPAM en 5 ans, 1500 dans les CAF, plusieurs centaines en vieillesse, des milliers dans le reouvrement) vont être supprimés dans les caisses de base : mutualisation des moyens, regroupements forcés, abandons de missions de service public, recentrage sur le "cœur de métier", certification ISO 9001 obligatoire, tout est mis en place pour transformer ce service public en service marchand.
On ne peut négliger que cette norme ISO décrit toutes les procédures de travail, les industrialisant. Quand ces procédures sont entièrement décrites, le travail peut être fait en tout ou partie par n’importe quel salarié, n’importe quelle entreprise privée.
Ouest France, dans son édition du 18 août, faisait part d’une "offre" d’une société de "services" auprès des directeurs de Caisses Primaires d’Assurance Maladie : il s’agit de prendre en charge les dossiers des assurés sociaux du régime général des salariés !
Le vocabulaire interne dans les organismes de Sécu change : l’exemple le plus flagrant est le terme de "client" (achetant un "service", un "produit") qui remplace dans toute la "communication" interne et externe le terme "d’assuré social" ayant des droits...
les Caisses de Sécu sont incitées... à quitter EDF/GDF dès que possible
les réseaux téléphoniques et informatiques ont été confiés à 9 Télécom
le "portail" assurés sociaux va répertorier les "services privés" tels les artisans, pompes funèbres, assureurs
une grande partie des revues pour les assurés est financée par la publicité...pour des assureurs privés
- Pour le personnel de la Sécu, on introduit l’individualisation à outrance, les objectifs personnels, le management par objectif, la relation "client-fournisseur", les primes d’intéressement collectives et individuelles, la concurrence entre les services voire entre les agents, les primes individualisées, on détruit les garanties collectives, les collectifs de travail : tout est fait pour construire pour chacun "ma petite entreprise dans ma tête". Que certains syndicats de salariés participent activement au grignotage en dit long sur le « consensus » laissant le champ libre au patronat.
Les personnels informaticiens des Caisses ont été mis en concurrence entre eux, Caisse par Caisse leur "coût" est évalué, mis en concurrence avec le Privé.
Le précédent gouvernement « socialiste » avait entamé le système solidaire par manque de courage politique : si la CMU ( Couverture Maladie Universelle) représente bien un progrès, elle peut déjà être fournie par la Sécu, une « mutuelle », une assurance privée, soumises entre elles à la "concurrence européenne".
Pourquoi ne pouvait-elle pas être assurée par la Sécurité Sociale, dont c’est la vocation, d’être « sociale » ?
L’important était bien pour les assurances privées de "mettre un pied" dans la Sécu, non ? Vous avez dit dérive ??? ou véritable volonté politique partagée ???
Par notre indifférence, notre inaction, notre résignation, notre désintérêt, nous contribuons à effacer toute trace du Conseil National de la Résistance !
Cette constitution européenne ouvre la voie à la compétition sauvage, fournit le cadre "légal" au démantèlement des services publics, nés des nationalisations, parmi lesquels la Sécu, pourtant conquise de haute lutte par certains syndicats ouvriers.
Est-ce légitime, est-ce ce que nous voulons laisser à nos enfants , est-ce la société que nous voulons construire ? Celle d’une société du « risque » chère aux patrons, où la seule « sécurité » sera celle du capital ?
RESISTER, c’est aussi militer pour le "NON" au capitalisme constitutionnalisé, c’est dire NON à ce traité constitutionnel européen
Patrice Bardet, salarié de la Sécu, délégué syndical Ufict-CGT (révocable par les syndiqué-e-s)