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Raison de la mise en attente :
ISRAEL ET PALESTINE
envoyé le 15/01/22 Mots-clés  proche et moyen orient  

(...)
Les tentatives de discussion sur l’antisémitisme à gauche se transforment presque toujours en discussions sur Israël. Nous avons déjà expliqué pourquoi le mélange de ces deux questions est problématique : s’il faut évidemment évoquer le conflit au Moyen-Orient, l’antisémitisme doit également être pris au sérieux et traité en respectant ses propres termes. Pourtant, cet amalgame même, ainsi que la grande importance accordée au conflit au Moyen-Orient dans le discours de la gauche contemporaine, exigent que l’on prête une attention particulière aux modèles et formes spécifiques que prend la critique d’Israël.

Rappelons une évidence : critiquer Israël n’est pas en soi antisémite. Pourtant, comme toute forme de racisme, l’antisémitisme ne s’exprime pas seulement, ni même principalement, par une haine raciale explicite ; il se traduit souvent par l’usage d’un langage codé, une attention accrue à des événements réels ou l’application de la politique du deux poids, deux mesures.

Pour cette raison, la distinction entre l’antisémitisme, l’antisionisme et la critique d’Israël et de ses politiques n’est pas aussi simple à effectuer que le suppose la gauche. De plus en plus, la réponse standard de la gauche à toute accusation d’antisémitisme dans une discussion sur Israël et la Palestine consiste à insister sur une distinction fondamentale entre l’antisionisme qui serait légitime, et l’antisémitisme raciste. Malheureusement, un simple changement de terminologie ne garantit pas qu’un discours ou une action particulière ne soit pas raciste (Kaplan et Small 2006 ; Hirsh 2018). Selon les normes habituelles de la pratique antiraciste, ce fait est incontestable. De nombreux militants de gauche acceptent volontiers que le racisme ouvert, qui est devenu moins acceptable socialement, se manifeste sous des formes codées, par exemple en dénonçant les « reines de l’aide sociale », les « voyous », les « hyper-prédateurs », les « méchants machos », etc. Il en va de même pour l’antisémitisme car le contexte historique, selon les sociologues Bergmann et Erb (1986), a créé une « latence de communication ». En effet, l’Holocauste a transformé les déclarations ouvertement antisémites en un tabou public dans les pays occidentaux. L’antisémitisme a donc mué et adopté une « communication détournée », une manière socialement acceptable de dénoncer les Juifs par le biais de l’État juif (Bergmann et Erb 1986 ; Beyer et Krumpal 2013).

En réalité, l’antisionisme est fréquemment motivé par l’antisémitisme, ou en tout cas on n’arrive pas à le distinguer de celui-ci. Aujourd’hui, les antisémites les plus explicites – les néonazis, les nationalistes blancs et les islamistes fondamentalistes – utilisent également le terme de « sionistes » plutôt que celui de « juifs », plus explicite, ou bien les deux à la fois. David Duke dénonce fréquemment le contrôle
« sioniste » sur le gouvernement américain, et a été un défenseur enthousiaste de la représentante démocrate Ilhan Omar. Après avoir été soutenus pendant des années, des militants éminents comme Gilad Atzmon et Alison Weir ont finalement été invités à quitter le mouvement de solidarité avec la Palestine pour avoir franchi à plusieurs reprises la limite de l’antisémitisme flagrant. Même s’ils se sentent peut-être gênés au milieu d’islamistes portant des banderoles antisémites qui assimilent les Juifs
à des cafards ou proclament « Solution finale au Moyen-Orient = Atomiser Tel Aviv », des antisionistes de gauche protestent néanmoins à leurs côtés contre la Journée annuelle d’Israël à New York.

Ainsi, s’il est vrai, du point de vue de la logique, que l’antisionisme n’est pas intrinsèquement antisémite, ces exemples et bien d’autres démontrent de manière tout aussi concluante qu’il peut néanmoins l’être, et l’a historiquement souvent été dans les milieux de gauche (Norwood 2013 ; Haury 2002). De plus, des études empiriques ont montré une corrélation entre les déclarations anti-juives et les critiques d’Israël (Beyer et Liebe 2016 ; Imhoff 2012 ; Kaplan et Small 2006). À la lumière de ces faits
et de ces fréquentations politiques indésirables, le mantra commun de la gauche selon lequel « L’antisionisme n’a rien à voir avec l’antisémitisme » est inadéquat si la gauche prend l’antisémitisme au sérieux. Aucun mot magique n’offre une protection absolue contre une accusation d’antisémitisme, ou de racisme. Les antiracistes sérieux ne restent jamais au niveau des mots ; ils examinent toujours soigneusement le contexte, le contenu et les tendances des déclarations politiques.

Nous avons donc besoin d’un ensemble cohérent de critères permettant de distinguer entre les critiques légitimes d’Israël et les critiques antisémites de cet Etat. Le spécialiste de l’antisémitisme Alan Johnson propose un critère général utile : « L’antisionisme antisémite déforme la signification d’Israël et du sionisme jusqu’à ce qu’ils deviennent des réceptacles appropriés pour les tropes, les images et les
idées de l’antisémitisme classique. En bref, l’ancien Juif diabolique a été remplacé aujourd’hui par un Israël diabolique : exceptionnellement malveillant, assoiffé de sang, tout-puissant, rusé, il dissimule ses manipulations et est toujours de mauvaise foi ; il incarne l’obstacle à un monde meilleur, plus pur, plus spirituel ; il mérite uniquement le châtiment, etc.
 » (2015)

Un autre outil utile est le test des 3D : Délégitimation, Diabolisation et Deux poids, deux mesures (Sharansky 2004). Aucun de ces critères ne fournit à lui seul une indication claire sur l’antisémitisme d’un individu ou d’un groupe ; selon le contexte, chacun peut simplement refléter une priorité et une orientation politiques. Cependant, ils offrent un kit utile pour évaluer l’antisémitisme, en particulier lorsque plusieurs de ces attitudes apparaissent en même temps. Ces trois comportements sont très répandus au sein de la gauche américaine contemporaine.

Délégitimation. Bien qu’Israël ait été créé conformément au droit international et aux Nations unies , son droit d’exister en tant qu’État-nation est contesté – tant militairement que politiquement – depuis sa création. Les arguments peuvent être fondés sur des positions anarchistes ou antinationales selon lesquelles tous les États sont illégitimes ; sur des positions « libérales » antisionistes selon lesquelles Israël est incapable d’accorder un statut spécial et une priorité aux Juifs tout en garantissant en même temps des droits égaux à tous ses citoyens ; ou sur des positions religieuses de groupes orthodoxes juifs comme les Neturei Karta qui estiment que la fondation d’un État juif avant le retour du Messie constitue une erreur. Cependant, dans la plupart des cas, la délégitimation d’Israël le transforme en un pays quasiment unique parmi les États-nations contemporains.

Cet objectif politique souvent inavoué a conduit même de fervents militants pro-palestiniens comme Norman Finkelstein (2012) et Noam Chomsky (2014) à critiquer le mouvement Boycott Désinvestissement Sanctions (BDS) qui, selon eux, considère l’existence même d’Israël comme illégitime, alors qu’ils cherchent, eux, à changer sa politique, même de façon radicale.

Diabolisation. Si le but de la propagande politique est d’inciter à réagir, la critique d’Israël prend souvent des formes particulièrement virulentes qui vont jusqu’à la diabolisation absolue. Fréquemment, les critiques de gauche ne se contentent pas de cibler des politiques gouvernementales spécifiques – ils remettent en question le droit même d’Israël à exister. Ce pays est régulièrement décrit comme un État exceptionnellement assoiffé de sang, maléfique et surpuissant.

Pour ce faire, les critiques reprennent tous les tropes historiques de l’antisémitisme, jusqu’au prélèvement d’organes, au meurtre d’enfants ou à l’empoisonnement de puits. Israël est couramment dépeint comme une dictature brutalement raciste engagée dans un « génocide », et l’on invente des comparaisons historiquement inexactes avec l’apartheid sud-africain et des analogies avec le régime nazi qui témoignent d’une totale insensibilité.

Bien que de nombreux États-nations violent les droits humains ou soient engagés dans des conflits territoriaux sanglants, la gauche accorde une attention disproportionnée à Israël par rapport aux autres Etats. Dans la même région, le régime syrien et l’État islamique ont tous deux utilisé des armes chimiques contre des civils, mais seuls les Israéliens sont étiquetés comme des « personnes qui tuent des enfants » dans les médias de gauche, comme un article du mensuel Jacobin l’a déclaré sans ambages, rappelant le trope du meurtre rituel (Shupak 2014). Selon de nombreux militants, cette vigilance accrue serait justifiée par la relation étroite entre les États-Unis et Israël, mais cet argument n’explique pas pourquoi la gauche ne dénonce pas le fait que les Etats-Unis entretiennent des relations tout aussi proches avec la Turquie, l’Arabie saoudite ou l’Inde. Aucun mouvement du type BDS ne vise ces régimes, et, en dehors des associations spécialisées dans la solidarité avec ces pays, les actes condamnables de ces Etats ne sont jamais régulièrement évoqués par la gauche.

Souvent, cette diabolisation ne s’arrête pas au gouvernement israélien ; elle s’étend à sa population juive, partout et à tout moment. Une grande partie du mouvement BDS tient tous les Israéliens pour responsables des crimes de leur gouvernement. Par conséquent, tout événement qui implique des Israéliens, indépendamment de leurs engagements politiques ou de leur parrainage, est susceptible d’être la cible de protestations et de boycott. Plus troublant encore, cette diabolisation s’est étendue aux Juifs non israéliens, comme dans le cas du musicien américain Matisyahu, qui s’est vu interdire de jouer lors d’un festival de musique en Espagne, en 2015, parce que, selon les organisateurs, il ne s’était pas exprimé « clairement contre la guerre et sur le droit au peuple palestinien d’avoir son propre Etat ».

Aucun autre mouvement de gauche ne tient une nation entière, ses citoyens ou les adeptes d’une religion, pour directement responsables des crimes de leur gouvernement – ou des crimes d’un Etat dont ils ne sont même pas les citoyens. En fait, les tentatives d’appliquer cette stratégie à d’autres groupes – en ciblant les musulmans et en exigeant d’eux des professions de foi patriotique après le 11 septembre 2001 par exemple – ont été jugées racistes, à juste titre. Cette diabolisation s’accompagne souvent de généralisations idéologiques selon lesquelles des tendances politiques ou des groupes particuliers en Israël – comme le Likoud, parti d’extrême droite – sont censés parler au nom de l’ensemble de la population. Cette attitude contraste fortement avec les hypothèses concernant l’autre camp, comme lorsque les militants de gauche affirment que le Hamas ne parle pas au nom de tous les Palestiniens, bien qu’il ait recueilli 45% des voix aux élections de 2006 à Gaza (Anderson 2015 ; Hasan 2019). La
diabolisation est si répandue et si globale que même les aspects progressistes de la société israélienne, tels que les droits des homosexuels ou les mouvements écologistes, sont rejetés comme un rideau de fumée visant à cacher les politiques brutales envers les Palestiniens. En conséquence, les militants « libéraux » ou de gauche en Israël doivent non seulement faire face à une forte opposition dans leur pays, mais aussi à des campagnes internationales organisées contre leur prétendu « pinkwashing » et leur
prétendu « homo-nationalisme ». Lorsque tous les événements et tous les individus associés à une seule nation sont considérés comme malfaisants, la diabolisation est clairement à l’œuvre.

Deux poids, deux mesures.
Comme le montrent ces exemples, la méthode du deux poids, deux mesures est appliquée à Israël et à aucune autre nation (Hirsh 2018, Rosenfeld 2019), et se manifeste sur cinq points : le choix des priorités politiques, la fondation de l’État, la formation de l’État, la conscience de soi , et la question de l’autodétermination (Arnold 2015).

Ce deux poids, deux mesures concernant les priorités politiques se manifeste lorsque la gauche accorde beaucoup plus d’attention et d’importance à la question d’Israël/ Palestine qu’à tout autre conflit dans le monde actuel. Israël est l’un des rares thèmes qui unisse une gauche pourtant extrêmement fractionnée. Ce conflit est tellement central dans la conception que la gauche américaine a d’elle-même qu’il est souvent un élément très visible, même dans des manifestations portant sur des sujets n’ayant
aucun rapport avec Israël, comme le changement climatique, les brutalités policières ou les droits des homosexuels. Cette omniprésence idéologique suggère que la gauche considère Israël à la fois comme un facteur d’unification et comme un pilier politique sur lequel reposent diverses autres formes d’oppression. Pourtant, en même temps, elle accorde peu d’attention (voire aucune) à divers autres conflits violents, occupations et guerres civiles. Par exemple, elle ne mène pas de campagnes soutenues contre l’annexion du Cachemire par l’Inde, la répression brutale des Kurdes par la Turquie, l’occupation de la Crimée par la Russie ou l’exécution publique des gays par l’Iran. Ce deux poids, deux mesures est encore plus flagrant pour les militants de gauche nord-américains qui ciblent le colonialisme de peuplement en Israël tout en bénéficiant directement de l’héritage d’un tel colonialisme de peuplement sur leur propre sol.

Le deux poids, deux mesures à propos de la fondation d’un Etat concerne la seule fondation d’Israël caractérisée comme artificielle et violente, contrairement au processus présumé pacifique et « organique » de la création d’autres Etats. Parce qu’il appelle à la fin non seulement de l’occupation mais de l’existence même d’Israël, l’antisionisme en est venu à représenter la position « radicale » évidente adoptée par la gauche. Pourtant, ce radicalisme repose sur des présomptions profondément « libérales » et anhistoriques sur la nature des États-nations. Il suppose qu’Israël serait une anomalie, exceptionnellement violente, plutôt que l’incarnation d’une règle extrêmement banale. L’antisionisme ignore sélectivement que tous les États existants sont également « artificiels », qu’ils sont nés et se maintiennent par la violence, la dépossession et l’exclusion.

Si la violence qui a accompagné la fondation d’Israël n’est pas unique, le moment historique tardif (ainsi que le contexte politique) de sa création l’est. Cela nous amène à la double norme connexe de la formation de l’État, qui considère Israël comme anachronique, comme un régime colonial et impérial engagé dans une forme dépassée d’expansionnisme colonial. Pourtant, une fois encore, cette caractéristique n’est pas propre à Israël. Les frontières ont été continuellement redessinées au cours de
l’histoire pour créer de nouveaux États.

Si l’on part seulement de l’année 1990, trente-quatre Etats ont été fondés depuis cette date. Beaucoup d’entre eux sont le résultat de guerres civiles ou d’appropriations de terres dépourvues de toute légitimité juridique, comme le montrent les cas actuels du Sud-Soudan et du Sahara occidental. Plusieurs États existants sont également engagés dans une expansion territoriale violente et répriment férocement des populations locales – la Turquie, l’Inde, la Russie, l’Éthiopie et le Maroc, pour ne citer qu’eux. La création et l’expansion d’un État s’accompagnent souvent de transferts forcés de populations. Pourtant, la revendication du droit au retour pour les Palestiniens est presque exclusivement dirigée contre Israël. Bien qu’il s’agisse d’un point d’achoppement persistant qui bloque les négociations en vue de la création d’un État palestinien, cette revendication est rarement avancée pour d’autres États divisés, par exemple l’Inde et le Pakistan. La gauche aborde également rarement le traitement des réfugiés palestiniens par d’autres États comme la Syrie et l’Égypte ; il ne mentionne pas non plus les centaines de milliers de réfugiés juifs exilés des pays arabes voisins après la guerre de 1948. Aucun de ces exemples ne peut justifier les crimes israéliens ou ceux commis dans le cadre de n’importe quelle autre occupation. Cependant, le manque d’attention et de réaction militante à leur sujet illustre plutôt un profond deux
poids, deux mesures qui opère au sein du discours politique de la gauche, attitude qui résonne avec les modèles historiques d’exceptionnalisme antisémite.

Le deux poids, deux mesures en matière de conscience de soi aboutit à critiquer Israël comme un Etat spécifiquement ethno-religieux. Pourtant, plusieurs autres États actuels pourraient être ciblés pour les mêmes raisons, et, au cours de l’histoire, la plupart des Etats ont suivi ce modèle. Aucun militant de gauche n’attaque la nature spécifiquement musulmane de la République islamique d’Iran ou de la République islamique du Pakistan. Presque toutes les nations de l’histoire ont été liées à un moment donné à une religion d’État et, à ce jour, toutes les nations appliquent des politiques d’immigration ethno-raciales restrictives. Mais seul l’État juif est régulièrement critiqué par la gauche pour son caractère spécifiquement religieux et sa manipulation démographique. Si les militants de gauche ont raison de rejeter à la fois le nationalisme ethno-religieux et les politiques restrictives en matière d’immigration et de démographie, ils sont loin d’être cohérents, lorsqu’ils critiquent certaines formes de nationalisme – les chauvinismes américain et israélien, chrétien et juif –, tout en ignorant, ou même en en rationalisant d’autres – les nations islamiques, les nationalismes ethno-religieux musulmans, hindous et bouddhistes.

Enfin, le deux poids, deux mesures de l’autodétermination conduit à ne reconnaître ce droit qu’aux Palestiniens. De nombreux mouvements d’autodétermination palestiniens sont défendus par la gauche – indépendamment de leur contenu politique – tandis que le sionisme est dénoncé comme synonyme de racisme et de violence, sans tenir compte non plus des spécificités de ses formes historiques, ou de son contenu politique. Cela s’applique aussi à la vision qu’a la gauche américaine du conflit israélo-palestinien dans son ensemble ; bien que cette histoire soit longue et compliquée, le deux poids, deux mesures de l’autodétermination aboutit à une analyse extrêmement unilatérale et simpliste.

La dépossession et la répression des Palestiniens sont bien réelles. Etant la force la plus puissante, Israël possède le plus grand pouvoir et a la plus grande responsabilité dans la résolution de ce conflit. En même temps, la gauche ignore sélectivement divers faits historiques importants concernant l’autre partie impliquée : les Juifs ont également des liens historiques avec cette région et leur propre histoire de peuple déplacé ; une longue histoire de persécution, d’exclusion, d’oppression et d’expulsion s’en est suivie et a culminé avec l’Holocauste ; en raison de ces oppressions historiques, le sionisme, en tant que mouvement de libération nationale et projet de construction d’un État, a commencé tard dans le jeu des puissances et dans des conditions historiques qu’il n’avait pas choisies ; Israël a subi de nombreuses attaques armées – y compris contre des civils – depuis sa création jusqu’à aujourd’hui (Linfield 2019, Memmi 1966).

Malgré cette histoire compliquée, la plupart des militants de gauche perçoivent avant tout la souffrance, la peur et la rage des Palestiniens comme étant légitimes. Ils soutiennent parfois des groupes réactionnaires tels que le Hamas ou le Hezbollah, en dépit de leur politique fondamentaliste. En revanche, les sentiments de peur, d’insécurité et de persécution historique chez les Israéliens juifs ne sont pas considérés comme légitimes. La gauche dépeint souvent la montée des acteurs politiques
palestiniens de droite comme le Hamas comme une réaction regrettable mais compréhensible face à la violence ; par contre, la montée du Likoud et le virage à droite d’Israël ne sont jamais interprétés comme une mauvaise réaction face à l’antisémitisme et à la violence contre les Juifs. Bien que les deux groupes soient irrédentistes et s’opposent au processus de paix, la gauche ne reconnaît généralement cela que pour Israël ; elle refuse d’admettre que ceux de l’autre bord politique n’accepteront jamais une coexistence pacifique avec ce qu’ils appellent « l’entité sioniste ». Dans un conflit marqué par des traumatismes et des pertes humaines des deux côtés, il n’est pas nécessaire de tracer un trait d’égalité entre la souffrance des deux parties pour reconnaître que la résolution d’un conflit est impossible si elle
ne prend en compte que les revendications d’une seule partie.

Pour résumer, si l’antisionisme et l’antisémitisme ne sont pas nécessairement équivalents, ils peuvent aussi l’être. Le simple fait d’insister sur le langage de l’antisionisme ne garantit pas qu’ils ne se chevauchent pas, comme le démontre un bref coup d’œil au discours utilisé par les néonazis « antisionistes »-antisémites susmentionnés. Nous avons proposé le test des « trois D » parce qu’il peut aider à distinguer entre les critiques légitimes d’Israël et les critiques motivées par l’antisémitisme, en se demandant si elles reposent sur la Délégitimation, la Diabolisation et le Deux poids, deux mesures. Étant donné qu’il existe de nombreux motifs légitimes de critiquer la politique israélienne, l’identification du deux poids, deux mesures représente un outil d’analyse particulièrement utile. À cette fin, nous avons identifié cinq domaines où s’applique le deux poids, deux mesures : le choix des priorités, la fondation de l’État, la formation de l’État, la conscience de soi, l’autodétermination. Le fait que d’autres États qui violent les droits de l’homme (la Russie, l’Iran, la Chine, la Turquie ou l’Arabie saoudite) ou que des sociétés coloniales de peuplement (les États-Unis, le Canada et l’Australie) ne soient pas soumis à la même norme de critique dénote un deux poids, deux mesures évident.

Aujourd’hui, l’antisionisme représente davantage qu’une prise de position politique vis-à-vis du conflit au Moyen-Orient : le rejet d’Israël s’est transformé en un marqueur distinctif d’appartenance à la gauche radicale (Hirsh 2016). Selon Shulamit Volkov (2006), il est devenu une forme de badge sous-culturel signalant que son porteur se trouve du bon côté de l’histoire ; il symbolise un rejet du colonialisme, de l’impérialisme, du racisme et du nationalisme, collectivement représentés par le
sionisme et incarnés par l’État d’Israël. Ce changement reflète une crise plus profonde de la gauche qui a commencé dans les années 1960 et se poursuit aujourd’hui : confrontée à son impuissance croissante au niveau national, elle recherche des sujets révolutionnaires en dehors de ses frontières (Gitlin 1993 ; Postone 2006). Malheureusement, cette fixation sur l’État juif comme principal lieu de pouvoir qui
propage le Mal dans le monde (ou comme second lieu après les États-Unis) reproduit un trope central de l’antisémitisme.
(...)

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