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Raison de la mise en attente :
Quand le mouvement ouvrier ne défendait pas le service public
envoyé le 07/02/23 Mots-clés  service public   critique économique  

Un regard sur des prises de positions radicales au moment de l’étatisation d’industries et de solidarités permet de tordre le cou à une vision aujourd’hui consensuelle des services publics comme conquête sociale.

QUAND LE MOUVEMENT OUVRIER NE DÉFENDAIT PAS LE SERVICE PUBLIC

« En ce moment, l’on est en train de fabriquer un communisme à l’usage des bourgeois : il est bien modeste ; il se contente de la transformation de certaines industries en services publics ; (…) On leur dit, voyez les postes, elles sont un service public communiste, fonctionnant admirablement au profit de la communauté, et à meilleur marché qu’elles ne pourraient le faire, si elles étaient confiées à une compagnie privée, comme c’était autrefois le cas. Le gaz, le chemin de fer métropolitain, la construction des logements ouvriers, etc., doivent devenir eux aussi des services publics (…). C’est parce que cette transformation présente des avantages multiples et incontestables aux bourgeois, que dans tous les pays capitalistes on voit les mêmes industries devenues services publics (armée, police, postes, télégraphes, fabrication de la monnaie, etc.). »

Ces bons mots, écrits en 1882 [1], sont de Paul Lafargue (1842-1911), gendre de Karl Marx et fondateur, avec Jules Guesde, du Parti ouvrier français. Si cette position n’est pas dominante dans le mouvement ouvrier de l’époque, elle en dit long sur les débats qui le divisent. La révolution industrielle, pour prendre tout son essor capitalistique, exige des infrastructures dont la prise en charge par le privé s’avérerait non rentable !

Quelle meilleure solution que de socialiser les coûts via l’étatisation ? Lafargue met en garde les mouvements socialistes et syndicalistes qui propagent l’idée que la mise en place des services publics serait un pas vers le socialisme. S’ensuit une série de critiques particulièrement actuelles…

« L’État peut donc diminuer sensiblement les prix [2] des services publics qu’il exploite. Ce sont les bourgeois qui bénéficient de cette réduction, parce que ce sont eux surtout qui en usent. Ainsi que d’ouvriers ne se servent de la poste qu’une ou deux fois par an : et que de maisons de commerce, que d’industriels, expédient des dix et vingt lettres par jour. »

L’industrie devenue publique servira avant tout les intérêts privés. L’égalité d’accès ne fait certainement pas partie des priorités gouvernementales.

« Les services publics deviennent pour les politiciens un moyen de caser leurs créatures et de donner de bonnes et grasses sinécures aux beaux fils de la bourgeoisie. »

Où l’on comprend que lesdits services sont d’emblée les organes de la reproduction des sphères dirigeantes, de leurs ouailles et de leurs logiques. Il faudra attendre encore un peu pour que ces derniers fassent une place aux bureaucrates syndicaux… Déjà, Lafargue dénonce le mythe de conditions de travail favorables :

« Les ateliers de l’État et de la commune sont des bagnes tout aussi épouvantables, si ce n’est plus, que les ateliers privés. Les travailleurs y sont plus rapacement exploités que dans les ateliers privés : ils sont courbés sous une autorité plus puissamment hiérarchisée ; ils ne peuvent se coaliser ni faire grève. Il n’en pourrait être autrement, l’État et la commune n’étant que des représentations officielles de la classe capitaliste. »

Si cet article a été écrit bien avant que le statut de fonctionnaire ne s’épaississe considérablement, cette critique doit retenir notre attention : le fonctionnariat n’a jamais été et n’est pas un espace libéré des pratiques les plus répugnantes de l’entreprise. Lafargue dresse le tableau d’une armée de travailleurs mise à la disposition des industriels.

Ensuite, Lafargue discute l’argument selon lequel une prise de pouvoir par des éléments ouvriers des directions des services publics faciliterait un passage vers le socia-lisme. Il estime que cette solution serait le parent pauvre d’une phase de transition vers le communisme. Surtout, il y aurait un danger à développer des lieux de corruption des leaders « révolutionnaires » et d’annoncer, de manière il est vrai un brin péremptoire la gratuité :

« Nous entrevoyons une période où les besoins de consommation et le pouvoir de production de la société savamment calculés, la consommation ainsi que la production seront gratuites. Il n’y aura alors ni salaires, ni prix de marchandises. La société humaine sera alors de nouveau entrée dans la période communiste. Il faut avoir toute l’ignorance et tout le bourgeoisisme d’un docteur possibiliste pour donner comme idéal communiste les services publics de la société actuelle. »

INSTITUTIONNALISER LES SOLIDARITÉS, UN REVERS CONTRE-RÉVOLUTIONNAIRE

La position qui suit est celle d’un militant d’ultra-gauche en août 1930 [3]. Il se place dans une perspective radicale d’autonomie et de non-compromission des forces révolutionnaires avec l’appareil d’État. Il dénonce la stratégie opportuniste des leaders politiques et syndicaux. Le propos est parfois un peu confus, exalté, voire contradictoire, notamment dans sa négation absolue d’un système d’assurance sociale post-révolutionnaire :

« Tandis que tous les partis ouvriers et toutes les organisations syndicales utilisent le réformisme, l’encouragent ou en font leur raison d’être, nous, les ouvriers-communistes, nous considérons comme un crime envers la révolution d’endormir la classe ouvrière dans le respect des lois, des parlements, des instances d’arbitrage, des conseils de prud’hommes, des municipalités, des chambres syndicales et des coopératives. Et nous sommes contre toute espèce d’assurances sociales, avec ou sans versement ouvrier, avec ou sans “révolution” – parce que la classe ouvrière a pour tâche de liquider l’État par l’extension permanente de sa révolution de classe, et non pas de lui confier des tâches nouvelles. Notre but n’est pas la création d’une nouvelle bureaucratie, c’est-à-dire, en fait, d’une nouvelle bourgeoisie qui aurait en main, comme en Russie, tout ce qu’il faut pour dominer et exploiter l’ouvrier ou pour le faire crever de faim en lui retirant sa carte syndicale qui lui donne droit à toute chose dans la vie (y compris aux assurances). » Pour lui, les solidarités concrètes au sein de la communauté révolutionnaire doivent se suffire à elles-mêmes dans une lutte à mort contre le capital, comme dans son dépassement : « Déjà dans notre mouvement, face à l’État, face aux patrons, il existe un certain collectivisme pratique. Chacun de nous sait que chômeur, malade, emprisonné, expulsé, il pourra compter inébranlablement sur l’aide des autres. Une journée de travail par semaine, tel est le montant des cotisations de propagande et de solidarité dans les Groupes ouvriers communistes. Et la solidarité, s’il le faut, passe avant la propagande ! En plus de cela le chômeur prend place à la table commune sans payer sa part des frais de la cuisine, on lui assure un gîte chez l’un ou chez l’autre. (…) Nos camarades de mouvement venus de l’étranger sont considérés comme des hôtes, et en retour nous comptons sur eux pour le cas où tel ou tel d’entre nous devrait changer de pays. »

La crainte est vive de voir le mouvement ouvrier continuer d’être « phagocyté » par le système. L’heure est à l’aiguisement des tensions, voire à leur exacerbation. L’embourgeoisement de l’aristocratie ouvrière syndicale et politique est vécu comme le pire danger. La création d’assurances sociales est perçue comme l’outil du maintien de la soumission du monde du travail aux intérêts de la classe dominante. Plus que de l’huile dans les rouages, il s’agirait d’une intégration définitive de la classe ouvrière dans le fonctionnement productif du capitalisme.

D’UNE GÉNÉRATION MILITANTE À L’AUTRE

Comment comparer une génération militante « sur le fil du rasoir », dans un temps où la communauté révolutionnaire contenait non seulement les possibilités du basculement mais les bases du fonctionnement de la future société communiste, avec notre époque, où l’individualisme consumériste a été tellement poussé à son paroxysme que l’on serait bien en peine de savoir dans quel chaos social nous nous retrouverions si les systèmes d’assurance sociale continuaient de s’écrouler ?

La consolidation des services publics et sociaux a toujours été une question centrale du mouvement ouvrier. Aujourd’hui, les luttes contre la précarisation du salariat se positionnent sur la problématique des droits et de leur libre accès. La lecture de ces textes nous invite à être prudents sur les potentialités rupturistes de ces revendications. Il ne s’agit pas de demander « plus d’État » ni « mieux d’État ». Pour nous, l’État n’est pas le lieu d’un compromis. Il reste l’endroit de la défense des intérêts des capitalistes, la gestion policière de la pauvreté en étant l’indice le plus actuel.

En revanche, nous croyons que la manière de mener la lutte, les rencontres, les assemblées, les moments d’entraide, etc., valent autant que le résultat revendicatif. Car une fois les temps forts retombés, ce sont bien les solidarités concrètes qui continuent de structurer les communautés antagonistes sur le long terme. Et c’est sur ces bases de vie sociale que nous affirmons comme évidentes de nouvelles formes de mutualisation et de partage des richesses produites.

Richard Schwarz

NOTES

1. P. Lafargue, « Le communisme et les services publics », « L’Egalité », 25 juin et 2 juillet 1882.

2. Entendre prix dans le sens de « coûts » dans le texte.

3. Voir encadré « À bas les assurances sociales ! », « L’Ouvrier communiste », n°11, août 1930.

ENCADRÉ

Le journal « L’Ouvrier communiste », dont nous citons ici des extraits, était l’organe des Groupes ouvriers communistes où se retrouvaient des militants de la gauche communiste italienne, tel Michelangelo Pappalardi, en compagnie de Jean Dautry et d’André Prudhommeaux. Ce groupe avait entrepris « la critique radicale du léninisme comme méthode de domination d’une caste politicienne sur les tendances spontanées du prolétariat révolutionnaire d’Occident » comme le proclamait l’éditorial du journal en mai 1930. Il condamnait radicalement la stratégie léniniste de nécessité d’un parti bolchevique, l’alliance avec les sociaux-démocrates et certaines couches de la bourgeoisie, l’utilisation du Parlement et des syndicats, s’inspirant des thèses du communiste hollandais Hermann Gorter dont Prudhommeaux traduisit la « Réponse à Lénine » (Ed. Librairie ouvrière, 1930).

Offensive Libertaire et Sociale n° 5
Janvier 2005 – p. 22-23.


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