22/07/17 Commémoration de la mort d’Adama Traoré

22/07/17 Commémoration de la mort d’Adama Traoré – Beaumont sur Oise
un an déjà…

Ce samedi 22 juillet se tenait à Beaumont sur Oise (95) la commémoration de la mort d’Adama Traoré, assassiné par trois gendarmes le 19 juillet 2016.

A peine arrivé sur place, on peut se rendre compte d’une certaine tension agitant les bleus (gendarmes en civil, voitures banalisées, motards en charge de la circulation), ça court, ça joue du Talkie-walkie, ça ralentie et ça observe les petits groupes ou les manifestants isolés dans les ruelles. On n’est pas encore arrivé au lieu de rendez vous qu’on se demanderais presque si on pourra y arriver sans contrôle préalable.

Pourtant, il n’y a pas plus de remue ménage que ça, beaucoup de commerces sont fermés, les rues sont pour la plupart vides, on repense surtout à la répression qu’on subi les amis et la famille d’Adama dans les premiers jours qui suivirent l’assassinat. C’est même les organisateurs de la marche qui se chargeront de l’encadrement, de tenir les barrières pour limiter l’accès aux voitures…

Arrivés prêt de la gare SNCF de Persan, la commune accolée au nord, l’un des lieux de rendez vous, on apprend qu’un groupe est bloqué par des contrôles d’identité et qu’ils fouillent les sacs. On sait pourtant bien que l’état d’esprit est à la marche pacifique et inclusive (on entend par là une manifestation où tout le monde pourrais se sentir à l’aise), si possible habillé en noir.

Nous sommes entre 700 et 1000 personnes, c’est dur d’estimer notre nombre, mais vu la taille de la commune, ça donne une certaine ampleur. Beaucoup de gent-es d’ailleurs ont fait le déplacement, mais nous reparlerons de ça dans la fin de ce compte rendu. Il n’y avais pas beaucoup d’organisations politiques présentes qui se sont affichées, exception faite de la brigade anti-négrophobie et d’élus, auto-proclamés ou non, de la France Insoumise, venus faire un peu de prosélytisme comme quoi la police serait moins violente sous une sixième république, ça prêterais presque à rire en d’autres circonstances…

Le cortège se met en branle, ça avance lentement, du fond on n’entend pas beaucoup les prises de parole de la famille d’Adama. La caserne de gendarmerie où a été déposé le corps est sur notre gauche, son enseigne à été recouverte en prévention d’un sac poubelle noir. Une première prière est donnée à la mémoire d’Adama.

Puis le cortège reprend sa marche, on reconnais les slogans habituels qui font ici l’unanimité « sans justice vous n’aurez jamais la paix », « police partout justice nulle part », « ni oubli, ni pardon », « tout le monde déteste la police »...curieusement la police est apparemment en rentrait, on en oublierais presque leur présence (pourtant massive, une centaine de gendarmes mobilisés selon les médias) si on ne reconnaissait pas quelques civils athlétiques en marge et un drone en vol à une quinzaine de mètre au dessus de nos têtes. C’est le visage que peut revêtir la répression ces dernières années et il faudra le prendre en compte systématiquement désormais, les événements de ce type sont sous contrôle...à distance.

On passe devant la mairie, elle aussi semble fermée et est gardée par une quinzaine de gardes mobiles équipés et en formation tactique. On marque un arrêt devant eux, ça se toise, ça hue et invective, leur simple vue est une insulte à la mémoire d’Adama et une offense de plus à ce pourquoi nous sommes à Beaumont ensemble.

On remonte une rue pavé et commerçante, vide et fantôme, peu hospitalière. On effectue un arrêt devant un appartement et on apprend que c’est ici qu’Adama a trouvé la mort. Après une deuxième prière, on repart dans le quartier sud de Boyenval, là ou vis la plupart des amis et de la famille Traoré.

Un terrain à été aménagé pour recevoir tout le monde, en plein cœur du quartier à mi chemin entre résidences et immeubles HLM : jeux gonflables, scène, tables et chaises, barnum où un repas était servi…
Sur scène, des prises de paroles de proches d’autres victimes : Ali Ziri, Angelo, Lamine Dieng, Zyed et Bouna, Babacar Guèye, Antonin (on en oublie sûrement et on s’en excuse), ayant fait le déplacement, et nous racontant, souvent avec émotion, les histoires et les vécus de ceux qui ont fait les frais de la mauvaise couleur de peau, d’avoir été là au mauvais moment et au mauvais endroit, des mauvaises convictions. Chacun-e a leur manière appelant à une large convergence de lutte contre les crimes policiers, ce qu’on ne devrais plus appeler une bavure mais un plus large système de domination et de contrôle des « populations à risque ».

Beaucoup de gent-es restent sur le terrain, de la musique passe, nombreux-es sont ceux et celles qui mangent, qui se rencontrent, beaucoup aussi mettent la main à la patte au service. La famille traoré monte sur scène pour nous remercier chaleureusement d’avoir fait le déplacement, en tentant de n’oublier personne, ce qui, vu le nombre et les origines géographiques, n’était pas simple.

Ce n’est pas évident de conclure cette chronique, d’une part, nous sommes reparti de Beaumont avec un sentiment amer d’inachevé, comment se contenter d’une marche de recueillement quand on réalise l’ampleur du travail à accomplir, les liens à tisser entre les différentes affaires, la somme de renseignements à collecter et transmettre ? On ne peut que qu’apprécier la démarche de cette famille et de leurs proches, de tout un quartier même, face à la somme de travail accomplis pour aboutir à cette journée de mémoire mais aussi de rencontres.
D’autres part, on se dit que ce n’est pas la dernière fois qu’on va entendre ces slogans et ces discours, qu’ils ont un air d’accoutumance et qu’ils font parti d’un paysage social à revoir radicalement. Il n’y a qu’en s’abreuvant unilatéralement à la source médiatique qu’on peut encore maintenir que ces drames sont des bavures, des cas isolés...assurément, le combat passe par le démontage de ce type de discours.

En attendant la suite, Justice pour Adama Traoré, pour les victimes des violences policières et leurs proches, on n’oublie pas, on ne pardonne pas. On pense aussi à Lahoucine Aït Omghar, à sa famillle et ses proches, de Montigny-en-gohelle, 4 ans déjà…

Eddy Milan. 13/08/17


publié le 13 août 2017

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