Pour Maxime mutilé sur la ZAD

La personne blessée s’appelle Maxime. Nous ne connaissons pas les circonstances de sa blessure et nous nous interdisons de tirer la moindre analyse de la situation. Ce que nous savons, c’est qu’il a eu la main arrachée par une grenade parce qu’il ne savait pas qu’elle pouvait lui arracher la main. Ce que nous savons aussi, c’est que les gendarmes tirent sur des manifestant-es désarmé-es des grenades qui peuvent tuer et, a fortiori, mutilent grièvement. Nous savons aussi que les grenades GLI F4 tirées depuis le mois d’avril sur les occupant-es de la ZAD sont produites en 2004 et que la gendarmerie a décidé de vider ses derniers stocks.

La presse nous dit, à sa manière si placide, qu’un “homme de 21 ans” a eu la main arrachée par une grenade le 22 mai sur la ZAD de Notre Dame des Landes. Pas de quoi en faire un scandale médiatique visiblement, puisque ça ne soulève pas une levée de boucliers. Certains journalistes, toujours aussi peu consciencieux, parlent juste de “grenade lacrymogène” quand d’autres pointent clairement la Grenade Lacrymogène Instantanée (GLI F4), dites “grenades assourdissante”. Cette grenade à effet de souffle contient 24 grammes de TNT et produit une détonation de 164 décibels. C’est une arme “à effet psychologique”.

Ce dont nous pouvons attester, c’est que l’ignorance qui entoure ces armements contribue à justifier leur usage et à mutiler des manifestants sans que rien ne change.

Dans deux articles précédents, Désarmons-les ! avait tiré le portrait de cette grenade, indiquant au passage que le gouvernement pensait doucement à sa suspension, du fait que la charge de TNT qu’elle contient occasionne des blessures trop importantes, pour la remplacer par une autre grenade à effet combiné, mais sans TNT, la GM2 L. Il serait temps en effet de la supprimer de l’arsenal policier, puisqu’elle a déjà gravement mutilé au moins 5 personnes (un minima correspondant à ce qui fait l’objet d’article de la presse mainstream et qui bien en dessous de la réalité) ces dernières années. A la ZAD durant les deux premières semaines de l’opération débutée en avril 2018, ce sont près de 4000 grenades GLI F4 qui ont été tirées sur les opposant-es. Parmi celles-ci, nous avons pu en ramasser des dizaines de défectueuses qui n’ont pas explosé et jonchaient le sol avec leur charge de TNT encore active.

Le problème lorsqu’on demande la suspension d’une munition plutôt qu’une autre, c’est qu’on semble accepter l’existence même d’un arsenal militaire entre les mains des forces de l’ordre, comme si celles-ci étaient engagées dans une guerre symétrique avec la population civile. Rappelons que les rares mutilations graves comptabilisées dans les rangs des policiers et gendarmes français depuis que le maintien de l’ordre existe, ont été occasionnées par leurs propres armes. Par exemple à Rennes en 2016, un policier qui s’apprêtait à lancer une grenade de désencerclement comme s’il s’agissait d’une arme offensive s’est vu arracher des doigts de la main. On pourrait presque dire “bien fait pour lui” tant l’utilisation de ces armes sur des civils à provoqué de drames du côté des manifestants sans jamais qu’on s’en offusque outre mesure.

https://desarmons.net/index.php/2018/05/24/combien-faudra-t-il-encore-de-membres-arrachees-par-la-gli-f4/

https://desarmons.net/index.php/2018/04/17/les-grenades-utilisees-dans-loperation-militaire-de-notre-dame-des-landes/

https://desarmons.net/index.php/2017/08/21/suite-au-15-aout-a-bure-autopsie-de-la-grenade-assourdissante-gli-f4/


Pour Maxime, mutilé sur la ZAD le 22 mai 2018, par Robin, mutilé à Bure le 15 août 2017

Mettre des mots sur l’horreur. Ne pas céder à la résignation. Au terrorisme d’État. Malgré le stylo qui tremble, écrire. Témoigner. Ne pas se laisser écraser par le concert d’opérations sémantiques, de propagande préventive et de censure qui cherche à nous couper de notre empathie et de la révolte qu’elle devrait spontanément engendrer.

Maxime vient de perdre sa main. Sa main droite. Pour toujours. Il rejoint bien plus gravement encore, l’enfer que j’ai vécu durant 9 mois. Le 15 août 2017, à Bure, l’explosion d’une grenade GLI-F4 tirée par les gendarmes mobiles creusait mon pied gauche sur un diamètre de 13cm et jusqu’à 3cm de profondeur arrachant peau, veines, nerfs, muscles et pulvérisant les os. C’était pendant une manifestation contre le projet Cigéo d’enfouissement de déchets radioactifs à 500m de profondeur. Il y a eu 30 blessés dont 4 graves.

Contrairement à ce que leur nom indique, les grenades GLI-F4 contiennent de la TNT et explosent ! Leurs déflagrations font 1m de diamètre et peuvent tuer si elles touchent une partie vitale. Les appellations de « lacrymogènes » ou d’« assourdissantes » que la préfecture et les ministres leur donnent dans les médias servent à masquer la vérité à leur sujet : CE SONT DES ARMES DE GUERRE !

L’État utilise des armes de guerre pour terrasser le peuple. Dans le cas présent, les conséquences sont bien pires qu’un tir à balle réelle.

Déjà, à l’époque, j’avais alerté sur les dangers des grenades explosives en organisant une manifestation pour exiger leur interdiction mais les grandes chaînes ont cantonné l’information à la région Lorraine. La majorité des français ignore encore la vérité sur ce sujet. Il est tombé près de 4000 grenades explosives sur la ZAD depuis le début de son invasion par les gendarmes mobiles. Provoquant des centaines et des centaines de blessés notamment à cause des éclats de métal qu’elles projettent. Où est la violence ?

Maxime est actuellement à l’hôpital.

Outre les intenses douleurs et le fort traumatisme qui le suivront nuit et jour, il devra désormais supporter ce handicap inimaginable : vivre avec une seule main. Cette main, que l’explosion lui a arraché sur le coup, l’État lui a volé pour prix de son combat, pour prix de notre combat. Dans les dernières décennies, la militarisation du maintien de l’ordre a fait couler trop de sang.

Combien d’éborgnés ? Combien de mutilés ? Combien de vies déchirées par l’utilisation criminelle des flashballs et des grenades explosives ? La violence de l’État pour mater toute résistance est extrême. Elle cherche à nous terroriser, à nous acculer à la résignation. Face à cela, la solidarité est notre arme et jamais la peur ne doit nous arrêter.

Proches, moins proches et tous ceux qui croiseront la route de Maxime, prenez soin de lui ! Tenez bon ! Il y a mille et une manières de lui apporter ce qui lui permettra de vivre. Écoutez-le, cherchez, trouvez !

La vie continue, le combat pour elle aussi. Maxime tiens bon !


publié le 25 mai 2018

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