Grève pour les salaires face à l’esclavagisme d’État

🔴 GRÈVE POUR LES SALAIRES FACE À L’ESCLAVAGISME D’ÉTAT

Les travailleurs du dépôt pétrolier de Mardyck (Dunkerque) sont réquisitionnés par la police

Depuis 4 semaines, des mouvements de grève ont lieu dans des raffineries de pétrole françaises pour protester contre l’enrichissement sans limites et sans partage des actionnaires des grands groupes. Le gros dépôt pétrolier de Mardyck (200 hectares) a été mis à l’arrêt par les salarié·es depuis plusieurs jours, avec un piquet de grève. Le gouvernement a envoyé sa police réquisitionner le personnel, et des contrôles ont eu lieu sur le piquet de grève. La CGT appelle à les rejoindre à l’adresse Établissement de Flandres – Total Energies, Route du Fortelet à Mardyck (57960). GPS : 51.02292, 2.26483.

◾ CONTRÔLES OU RÉQUISITIONS ?

Ce jeudi 13 octobre au matin, les flics se sont pointés sur le piquet de grève. Une vingtaine de salarié·es se rassemblaient et une énorme barricade était debout. Les flics les ont contrôlés. D’après un représentant syndical (au micro de la VDN) : « On nous a dit qu’il s’agissait d’un simple contrôle d’identité mais nous pensons qu’il s’agit des réquisitions. Ce n’est pas une grosse surprise, c’était dans les tuyaux depuis plusieurs jours. »

Mais ça ne s’arrête pas là. D’après un représentant syndical FO (aussi à la VDN) : « Un salarié nous a appelés ce matin. Les gendarmes l’ont réquisitionné à son domicile devant sa famille. C’est inadmissible ! Ce salarié ne devait même pas travailler aujourd’hui, il n’était pas sur les plannings. » La direction estime que le site pourra reprendre à 14h ce jeudi. La CGT envisage de bloquer les camions si c’est le cas.

Témoignage d’un membre de la CGT sur Facebook : https://www.facebook.com/watch/?v=421026146876423

La réquisition est un outil que l’État utilise en cas d’« urgence, lorsque l’atteinte constatée ou prévisible au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques l’exige », par un arrêté motivé d’un préfet (article L.2215-1 du code général des collectivités territoriales). Cette mesure, exercée dans un contexte de grève, porte atteinte au droit de grève, parce que c’est une manière de forcer légalement à travailler des salarié·es qui ont décidé légalement de ne pas travailler. Le travail forcé, il a un autre nom. C’est l’esclavage.

◾ TOTAL PREND EN OTAGE SES SALARIÉ·ES

Fin 2021, les salarié·es de Total Energies ont obtenu une augmentation de salaire de 3,5% pour l’année 2022. Cette année, avec 7 à 10% d’inflation (selon qui fait le calcul), cette augmentation semble ridicule. Malgré la « crise économique », Total Energies a réalisé un bénéfice net de 10,9 milliards d’euros pour l’année 2022, année qui n’est même pas terminée. L’entreprise a ainsi reversé 2,62 milliards de dividende « exceptionnel » à ses actionnaires. Rien de plus pour les salarié·es. Les négociations pour l’augmentation de salaire en 2023 ne commenceront qu’en novembre, mais une partie des salarié·es demande à revaloriser leurs salaires de 2022 de 10% (7% pour l’inflation et 3% pour le partage des richesses). Les directions font la sourde oreille. Donc les salarié·es exercent un droit légal de grève.

Le gouvernement et les directions des groupes concernés mettent une énergie considérable à la décrédibilisation du mouvement, parlant d’une prise d’otage des français·es. La direction de Total refuse de discuter avec des syndicats ou salarié·es qui « bloquent ». Pire, dans les médias, ils disent que le salaire moyen («  sur une base annualisée ») d’un salarié est de 5000 euros. Il s’agit en fait d’un salaire brut, en comptant les primes d’intéressement et l’ancienneté. Personne ne calcule un salaire de cette manière. La CGT rappelle que cette moyenne est plutôt aux alentours de 3000 euros pour un travail à haute qualification et à hauts risques pour la santé (un travailleur de raffinerie perd 7 ans d’espérance de vie). Ce subterfuge rhétorique vise à monter la population contre les grévistes, en stipulant qu’il s’agirait de travailleurs privilégiés. Alors que le problème, c’est les riches, les patrons et les actionnaires qui ne veulent rien partager. Le patron gagne à lui seul 6 millions d’euros de salaire. Il s’est augmenté de 51% l’année dernière.

« On leur demande une mesure de rattrapage [pour l’année 2022], et ils nous répondent "6% pour l’année prochaine". Mais où est le maintien de notre niveau de vie ? La mesure de rattrapage ne passe pas par une prime : ça passe par des salaires, parce que l’inflation on va se la prendre dans la gueule pendant tout le reste de notre vie. » Alexis Antonioli, secrétaire syndical de la CGT Total Energies le 13 octobre 2022 sur le piquet de grève de Total Normandie.
Il continue : « 2,62 milliards pour l’actionnaire. Ça correspond à une augmentation de tous les salariés de 300 euros pendant 12 ans. On rougirait presque de demander ça. Selon la CGT, si en 2021, Total avait doublé nos salaires, ils leur resterait 6 milliards de profits. » Rien à ajouter : à l’attaque.

◾ LE MOUVEMENT S’AMPLIFIE : VERS UNE GRÈVE GÉNÉRALE ?

Plusieurs branches du secteur de l’énergie se mobilisent, suivent le mouvement pour l’augmentation des salaires.
- Les salarié·es de certaines stations essence, notamment sur des aires d’autoroutes (où les entreprises augmentent magiquement le prix de l’essence et des denrées), ont aussi demandé des augmentations de salaires. Les syndicats de la filiale de Total Argedis ont annoncé rejoindre la grève depuis mardi.
- Les ouvriers EDF de la centrale de Gravelines (59), à quelques kilomètres de Mardyck, sont en grève depuis ce 13 octobre pour 5% d’augmentation. Ils ont bloqué à 50% le réacteur n°1 dont la production est à destination de l’aciérie très énergivore Aluminium Dunkerque. Même mouvement dans les centrales du Bugey (01), de Cruas (07) et du Tricastin (26).

Le mouvement s’étend au delà du secteur de l’énergie, et certains secteurs se mobilisaient déjà avant qu’on parle des raffineries :
- Le théâtre de l’Odéon à Paris est paralysé par une grève depuis 11 jours. 7% d’augmentation est demandé pour les 120 salarié·es.
- Le syndicat CGT de la société de transport Artis à Arras (62) demande une augmentation des salaires mensuels bruts de 5%. La grève est prévue jusque le 21 octobre. Pareil à Saint-Nazaire (44).
- Les salarié·es de l’usine auto Stellantis (ex-PSA) à Rennes (35) demandent une augmentation des salaires. Ils ont fait plusieurs jours de débrayage depuis 2 semaines.
- À Toulouse, des salarié·es de Daher ont demandé 10% d’augmentation et une prime de 1000€.
- À Paris, le CCAS est en grève pour des salaires décents.
- Les dockers de Marseille et du Havre soutiennent publiquement les grévistes des raffineries.
- Les cheminot·es envisagent de suivre le mouvement. Nous en saurons plus bientôt.

La direction de la CGT, en réaction aux réquisitions, a appelé à une mobilisation interprofessionnelle le 18 octobre 2022, pour l’augmentation des salaires. Le même jour, une mobilisation des lycées professionnels est attendue contre une réforme des lycées pro proposée par Macron.
À Lille, le rendez-vous est donné à 14h30 à Porte de Paris, le 18/10/22. Soyons nombreuses.


publié le 13 octobre 2022

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