Ce samedi 5 février 2022, É. Zemmour s’est rendu à Lille pour son 3e meeting présidentiel. Entre 2000 et 3000 personnes ont répondu à l’appel à manifester contre ce raciste, dans un cortège très jeune, sur-déterminé.
Siamo tutti antifascisti
De nombreuses banderoles très créatives ont fleuri dans la rue, de « FCK ZMR », « Adelphité décoloniale, uni.e.s contre le capital ! »*, « Faire bloc les mettra à genoux », « Lille contre Zemmour » ou encore « Coucou le Z, on vient te grand-remplacer ». Des pancartes, des slogans, de l’énergie qui montre à quel point on ne veut pas de l’extrême-droite à Lille. Des fumigènes et des feux d’artifice ont craqué pour mettre des paillettes dans Lille face à la morosité tricolore que nous vend l’autre réac’. Boulevard Victor Hugo, des patates et des carottes ont même été envoyées dans la direction des flics (elles ont fini en purée). Pour une fois depuis longtemps dans la ville, on a senti une rigueur d’organisation pour faire bloc, sans jamais se scinder malgré une pression policière très forte. L’occupation politique et antifasciste de la rue était soutenue et ça fait plaisir à voir.
La police protège les fascistes
Malgré ça, on déplore une présence policière rarement égalée. Fouilles à l’entrée de la manifestation, barrages à tous les coins de rue pour calibrer le parcours, canon à eau bien positionné pour dégommer toute personne qui ne traverse pas dans les clous. Au croisement Solférino – Victor Hugo, des centaines de flics bloquaient les quatre rues adjacentes. Sans surprise, ils se sont fait chahuter et ont répondu par la violence. Les flics ont fait usage de gaz lacrymogènes à 7 moments différents, toujours dans un but de provocation des manifestant·e·s.
Au rassemblement de départ, Porte de Paris, une quinzaine de flics traverse la place sereinement pour essayer d’interpeller une personne : la foule les entoure en demandant de le laisser tranquille. Pour se sortir de là, ils ont gazé une première fois, en emportant la personne (arrestation préventive). Les scènes suivantes ont eu lieu sur le parcours, s’accompagnant de charges pour tenter d’interpeller des gens (dans la violence) ou de dérober des banderoles. Au moins 4 arrestations ont eu lieu pendant la manifestation, dont une où un homme s’est fait traîner au sol, près de la place Sébastopol. D’autres arrestations ont eu lieu après la manif, dans le Vieux-Lille, alors que des gens se faisaient tabasser à coups de batte par des nazis cagoulés du bar identitaire La Citadelle. Plusieurs personnes ont été blessé avec un besoin évident de soins. À l’heure où on écrit ces lignes, une partie des personnes arrêtées a été relâchée. Soutien aux autres !
Deux manifs en une ?
Parmi les composantes qui appelaient à la manifestation, il y avait des organisations assez différentes. Derrière une même banderole, la Jeune Garde, les Jeunes Communistes et le NPA : un côté très « stade de foot », avec des chants parfois navrants qui se veulent enivrants, donne un ton militaire et artificiel à la manifestation. Lors des charges policières et des gazages, les personnes présentes devant leur banderole ne pouvaient pas se réfugier vers l’arrière : « on couvre nos rangs, pas tout le monde », nous dit-on. De même, il est arrivée que cette partie du cortège ralentisse la cadence créant des creux dangereux entre la tête et le reste de la manifestation : occasion rêvée pour la flicaille de tenter de scinder la manif pour nous disperser (ce qui ne s’est pas produit aujourd’hui car la tête diminuait ainsi le rythme). Mais ce manque de solidarité et d’union claire dans la manifestation est lâche et décevant.
On remarque que cet ostensible militantisme de façade tend à prendre le pas sur les autres formes de militantisme, plus radicaux ou autonomes. La présence d’un chauffeur de salle – même pas lillois – en avant de cortège pour haranguer la foule impose une vision enjolivée et hiérarchisée des luttes. On se pose sincèrement la question des objectifs de ce genre de pratiques : quand la moitié de la manifestation se montre déterminée à aller dire à Zemmour en face qu’il n’est pas la bienvenu, l’autre semble se contenter de dresser des drapeaux, agiter des fumigènes, et se laisser tolérables. Soyons intolérables comme on ne tolère pas le fascisme.
Vigilance antifasciste
Quelques embrouilles ont eu lieu entre des manifestant·e·s, certainement pour savoir qui aurait la plus grosse banderole, le plus gros drapeau ou savoir qui porte le plus de « valeurs » antifascistes : c’est surtout l’occasion d’une démonstration de biceps que nous ne voulons pas voir dans ces manifestations – préférez viser les flics si vous tenez à agresser des gens. Il est important de rappeler que personne n’a le monopole de l’antifascisme.
Aussi, nous avons relevé la présence de VA+, la chaîne YouTube de Valeurs Actuelles, dans la manifestation. « On veut avoir le point de vue des antifascistes », nous font-ils croire. Ce média, qui ne cache pas sa haine envers toute pensée qui se situerait en faveur des classes populaires, est là pour provoquer, récupérer des phrases à la volée qu’ils réutiliseront pour saucer leur propagande anti-militante. Des personnes ont choisi de leur répondre jugeant bon « qu’on leur donne au moins la parole ». Heureusement, quelques personnes les ont fait fuir.
Pour finir, certain·e·s manifestant·e·s n’ont pas apprécié les tensions qui ont entouré le virage du camion de la CGT dans la rue Gantois. Si nous reconnaissons l’importance qu’à eu ce camion dans cette manif, il ne faut pas chercher des poux chez les un·e·s ou les autres s’il n’arrive pas à faire ses manœuvres.
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Cette mobilisation imposante donne envie de poursuivre la lutte antifasciste. Dans l’intersectionnalité pour porter une analyse politique large de l’impact du pouvoir et de l’extrême-droite sur nos vies, et dans la détermination pour ne plus se contenter de faire une balade et porter nos idées là où elles doivent l’être. Nous invitons tout le monde à prendre garde à la présence des fachos enorgueillis par le Z ce week-end, et à poursuivre le combat par tous les moyens nécessaires : textes, assemblées, manifestations, sabotage. Partout où Zemmour ira, il trouvera une déter antifasciste pour le contrer !
Des antifascistes anti-autoritaires
* Adelphité : nom neutre pour désigner la fraternité et la sororité.
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